Alexandra, vous n’avez que 27 ans. Vous êtes une jeune diplômée ifocop : quel métier exerciez-vous avant celui de Community Manager ?
Avant de décrocher mon diplôme (BAC+4) de Community Manager, je travaillais dans l’univers de la beauté en tant que Conseillère de vente et esthéticienne/maquilleuse. J’avais, avant cela, obtenu un BTS Métiers de l’esthétique, de la cosmétique et de la parfumerie. Ce métier, que j’ai exercé pendant cinq ans, je l’ai aimé, mais je l’ai quitté sans regret malgré les bonnes relations que j’entretenais avec clients, car les conditions de travail ne me convenaient plus : il fallait être disponible le week-end, les jours fériés, accepter des horaires décalés, les problèmes de dos qu’engendraient les prestations en cabine… Tout cela au SMIC ! Le coup de grâce – et en même temps la meilleure opportunité qui se soit présentée à moi – sera tombé quand le gouvernement, à l’occasion des confinements successifs, aura désigné notre secteur d’activité comme « non essentiel », nous clouant, toutes et tous, sur le canapé pendant des semaines et des semaines. Forcément, ça fait réfléchir. Et dans mon cas, cela aura fait naître une envie irrépressible de changer de vie professionnelle…
Je souhaitais me tourner vers un métier d’avenir qui offre de meilleures perspectives »
Pourquoi, alors, vous orienter vers le métier de Community Manager ? C’est clairement aux antipodes…
Je souhaitais me tourner vers un métier d’avenir qui offre de meilleures perspectives, notamment en termes d’évolution professionnelle. Pour en avoir discuté autour de moi, je me suis d’ailleurs rapidement aperçue que chaque apprenant avait non seulement sa propre définition du métier, mais aussi ses propres attentes envers lui. Pour certaine(e)s, maîtriser les réseaux sociaux, c’est se donner la clé de l’indépendance à travers une future activité freelance. Mobilité, liberté… Pour d’autres, c’est choisir de travailler au service d’une marque ou d’un organisme directement depuis les services, en tant que salarié(e). Et ensuite choisir de se spécialiser ou de monter en compétences et en grade.
Et pour vous ?
Moi, je me situe plutôt dans le deuxième cas de figure. Même si pour l’heure, je suis en recherche d’un emploi. Pas de n’importe quel emploi, je précise. Un emploi qui me corresponde. C’est la raison pour laquelle, depuis l’obtention de mon diplôme, j’ai déjà postulé à des offres sans grand succès à cause des compétences demandées par les recruteurs… Et cela, malgré une présélection déjà radicale des annonces publiées en ligne.
Pour quelle raison ?
Je pense qu’en raison du caractère relativement récent de cette profession, certains employeurs ont besoin d’être accompagnés dans la bonne compréhension du métier. Leur argument est bon : être sur les réseaux, soigner la communication, booster le marketing… Mais je rappelle qu’on n’est ni infographistes, ni designers, même si la polyvalence demeure notre principal atout. Bref, cela reste néanmoins très flatteur parce que maintenant, le métier de Community manager est considéré comme essentiel à l’entreprise.
Chaque apprenant a non seulement sa propre définition du métier, mais aussi ses propres attentes envers lui »
C’est un peu la définition du métier.
Non, un Community manager doit rester un Community manager, au risque de s’éparpiller. Bien sûr, par l’agilité que ce métier exige, on est forcément un peu amené à « toucher à tout », y compris au graphisme et à la vidéo, dans l’objectif d’enrichir nos contenus. Mais de là à faire trois postes en un ? On finirait par perdre de notre substance.
Le Community Manager est-il forcément un Geek ?
(Sourire) Sans tomber dans la caricature, je pense que oui, un peu quand même… J’assume d’ailleurs, pour ma part, pleinement ce statut « geek » puisque je suis à la fois micro-influenceuse littéraire sur Instagram et productrice de contenu en lien avec le Gaming grâce à des vidéos en streaming sur Twitch. Les réseaux sociaux, j’aime ça, je maîtrise à titre personnel, mais de là à en faire un vrai métier, cela aurait été compliqué sans formation.
Community Manager, ce n’est pas possible 100% en auto-apprentissage ?
Rien n’est impossible dans la vie mais effectivement, au regard des outils à maîtriser et des nombreuses notions à emmagasiner, notamment sur le plan marketing, il est recommandé de se constituer un bagage solide et apprendre au contact des professionnels. Cela, parce que, selon moi, réaliser un benchmark, présenter un rapport d’audience, construire et défendre une stratégie adaptée à la cible et à chaque média… Ce n’est pas quelque chose d’inné.
Votre plus grande découverte au sujet de ce métier ?
Je savais qu’être Community Manager imposait de travailler de manière structurée, mais j’ai été étonnée de découvrir à quel point la stratégie occupe une place centrale dans les actions au quotidien : un post de deux lignes et une photo peut nécessiter une heure (parfois plus !) de travail ! On ne peut pas toucher tout le monde, du coup, on commence par se demander « qui est la cible ? ». Et au cœur de cette cible, quels sont les individus à atteindre. Puis, on s’intéresse aux usages, à l’écosystème social tout entier : quels réseaux, quels créneaux, quels médias (photo, vidéo, live, post…). Puis on se lance. Vient ensuite le temps de l’analyse, du repérage des indicateurs clés pour être encore plus performant la fois d’après… Être Community manager, c’est tellement plus que « juste » poster sur les réseaux sociaux.
Community manager un jour, Community manager toujours !
Bien sûr que non. On peut choisir de s’orienter vers la production de contenu à proprement parler en devant Content Manager ; on peut préférer, comme moi, œuvrer sur le plan stratégique et au contact des usagers (Community manager). On peut, sinon, évoluer vers un post de Social Media manager et superviser un service entier. Mais cela exige davantage d’expérience. Je voudrais aussi préciser qu’on peut, tout en continuant à exercer le même emploi, donner un nouveau souffle à son métier en changeant de secteur d’activité : travailler l’image 2.0 d’un laboratoire médical, d’une célébrité, d’une marque automobile ou d’une enseigne de prêt-à-porter, c’est peut-être piocher dans la même boite à outils, mais la ressemblance s’arrête là.
Le diplôme : plutôt pour la forme ou pour le fond ?
Pour les deux. Le fond, je viens d’en parler, il est essentiel. La forme aussi, parce que détenir un diplôme reconnu et officiel est souvent le prérequis de toute offre d’emploi qu’on retrouve aujourd’hui sur le marché.
Même question concernant le métier, cette fois.
Pour les deux raisons : pour la forme car on ne s’y ennuie jamais, parce que c’est compatible avec le télétravail, que les salaires (autour de 30K€ annuels) et les horaires sont meilleurs… Et qu’on recrute partout des Community managers. Pour le fond aussi bien sûr, parce que c’est un métier vif, stimulant.
Quelles sont les trois qualités essentielles dont il faut disposer ?
Polyvalence, car chaque journée est différente et parce que chaque média social exige un savoir-faire bien précis. Gestion du stress car être Community manager, c’est assurer un « service client » interne comme externe en répondant à la fois aux attentes de l’émetteur du message, comme de celles et ceux qui le reçoivent… et ne se privent pas de commenter, parfois avec vivacité. Enfin, je répondrai la créativité, pour des raisons évidentes : sur la toile, dans la masse, si on n’est pas remarquable, on est invisible.
Une chose nous met tous sur un pied d’égalité : ce métier, on le découvre tous en même temps. Chacun a sa chance »
Ce métier vous semble-t-il accessible à tous, même aux profils dits « seniors » ?
Oui, même s’il est plus facile pour les jeunes générations qui ont grandi avec. Mais vous savez, il y a une chose qui nous met tous sur un pied d’égalité : à la vitesse où les choses bougent dans notre métier et sur les réseaux sociaux, on le découvre tous en même temps. Après, ce n’est qu’une question de passion et de travail.