Le coût d’un recrutement raté peut être très élevé, atteignant parfois plusieurs dizaines de milliers d’euros. Les employeurs hésitent donc à donner leur chance à des profils plus atypiques. Pourtant, les personnes en reconversion ont de nombreux atouts à faire valoir. Alors comment convaincre les recruteurs ? Les conseils de Corinne Cabanes, experte RH depuis plus de trente ans.
La crise sanitaire n’en finit pas de bouleverser le monde du travail. Pour certains, elle a été un révélateur, voire un accélérateur de changement professionnel. Les principales raisons mises en avant ? La recherche d’un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, et l’envie d’avoir un métier ayant plus de sens. « La crise a largement contribué à rebattre les cartes et inciter à la prise de risque, pour entreprendre son propre parcours, confirme Corinne Cabanes, partenaire de l’éditeur de solutions Neobrain. La période a été l’occasion de s’interroger sur ses besoins physiologiques et psychologiques. »
Les soft skills en première ligne
Une aspiration légitime, qui nécessite une réflexion approfondie sur ses motivations et ses compétences transférables, avant d’entreprendre des actions de formation. Puis vient le temps de rencontrer – et de convaincre – des recruteurs… « D’une façon générale, ils ne voient pas d’un œil très favorable les reconversions, ajoute-t-elle. Ils préfèrent les profils directement opérationnels. »
L’experte note néanmoins quelques exceptions, comme les personnes venant de secteurs où les soft skills (les compétences de base) sont importantes : « Par exemple, l’hôtellerie et la restauration, où la relation client et le sens du service sont particulièrement marqués. Un concierge d’hôtel, dont le principal hobby est l’informatique, pourra notamment se reconvertir dans le digital, sur un métier de costumer care. L’entreprise sera plus facilement incitée à l’aider à acquérir les compétences techniques qui lui manquent. »
Cette prime aux compétences comportementales est confirmée par une étude menée par Monster sur les enjeux de recrutement. Pour les professionnels RH interrogés, travail en équipe, créativité, communication, leadership et capacité à résoudre des problèmes sont les compétences les plus difficiles à déceler.
Valoriser son CV, une fausse bonne idée
Si se référer à ses expériences professionnelles passées est utile pour démontrer ses soft skills, attention en revanche à ne pas trop mettre l’accent sur son ancien métier. Pour Corinne Cabanes, « si l’essentiel de l’entretien est dédié à la carrière et aux réalisations, le recruteur risque de conserver cette image, sans réussir à projeter le candidat dans les attendus du poste. L’échange doit privilégier l’avenir, et la plus-value que la personne en reconversion va pouvoir apporter. » C’est d’autant plus important quand le changement d’orientation est radical comme par exemple passer d’un grand groupe à une start-up ou renoncer à des fonctions d’encadrement pour accepter d’être managé. « La démarche de reconversion est plus aisée quand le métier de départ et celui visé sont des cousins germains plutôt que de parfaits étrangers. »
Des arguments structurés dans une lettre de motivation
Plusieurs points ont tout intérêt à être mis en avant pendant l’entretien. Il s’agit d’abord de démontrer la pertinence de sa démarche, cohérente, réfléchie et structurée (pourquoi vous souhaitez changer de cap professionnel) ; ce que vous avez mis en place pour murir et concrétiser votre projet (rencontres de professionnels du secteur, veille sur le domaine d’activité ou le métier, appui sur des spécialistes de la formation, stages…) ; et quels sont vos atouts pour aller vers ce nouveau métier. « La personne en reconversion peut ensuite tirer une synthèse de ses acquis, de ses compétences et de ses objectifs. Cette approche par étapes va aider le recruteur à mieux appréhender sa motivation ainsi que le bienfondé de sa démarche. »
C’est sans doute dans ce cadre que la lettre de motivation retrouve toute sa dimension. « Elle permet de structurer les arguments en faveur de ce changement de cap, estime Corinne Cabanes. La lettre doit d’abord présenter le projet professionnel et en quoi il peut correspondre aux besoins stratégiques de l’entreprise. Ensuite, elle doit mentionner l’ensemble des démarches effectuées pour monter en compétences – formations, stages, échanges avec des personnes exerçant le métier visé… ». Il est également très important que cette lettre démontre un haut niveau de connaissance sur l’entreprise, son positionnement, ses enjeux, et son environnement concurrentiel.
« Il ne suffit pas de mettre ses aspirations à l’épreuve de la réalité, résume l’experte. Il faut aussi démontrer sa motivation, arguments à l’appui. Les recruteurs prêts à embaucher des actifs en reconversion restent une denrée assez rare : mieux vaut se donner toutes les chances de les convaincre. »
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